La lutte c’est la fête !

Demain le conseil constitutionnel rend sa décision.

Naturellement les autres institutions y sont suspendues. Intersyndicale, partis, etc. Toutes et tous attendent la décision des « sages ».

Les « sages » valident le contrôle d’identité partout à Mayotte (préalable à l’ignoble opération de Darmanin où les flics marquent des maisons) ? Ce sont des « sages ».
Les « sages » valident la détention administrative, c’est-à-dire sans jugement, dans les CRA ? Ce sont des « sages ».
Les « sages » jugent que les pénalités d’impôts d’entreprise relèvent du droit pénal et non administratif ? Ce sont des sages. Forcément, les bamboulas, on peut les foutre au gnouf sans jugement, il en va autrement des comptes fiscaux des Veolia ou de Renault. C’est ça la « sagesse ».

Quand des camarades d’ATTAC osent mettre une banderole en face du conseil, demeure des « sages », ils vont en garde à vue. C’est normal ! Ils dérangent les « sages ».

Que faudrait-il alors attendre d’une telle institution sinon le pire ?

Rien que le pire. Demain les « sages » rendront leur copie. Peu importe ce qu’elle contiendra (et à mon avis elle contiendra de quoi permettre à Macron de continuer son mandat destructeur tout en permettant aux ramollis de prétendre avoir gagné sur telle ou telle mesure annexe).

Elle contiendra surtout la faillite et la déligitimation finale des institutions. Les gens sont, pour partie, suspendus à la décision de ce qu’ils pensent être un rempart alors que ce n’est qu’une vitrine.

Le conseil constitutionnel est la vitrine légale de la suprême violence du capital. C’était le slogan de la manifestation que j’avais déclarée demain.

Interdite.

Des gens assis menacent « l’impératif de maintien de l’ordre public ». Fin de la blague. En fait pas de blague du tout, c’est tragique. On ne peut plus s’asseoir.

S’asseoir menace l’ordre public

Tout à l’heure, j’étais en manifestation avec des amis. J’étais place de la bastille. Une grenade a explosé à un mètre de moi. Je discutais avec un camarade égoutier. On devait également menacer l’ordre public. Un peu plus tard, Une charge. Des coups de boucliers. Des flics en rage. On ne faisait rien. On parlait.

Parler, c’est une menace contre l’ordre public.

Faut dire qu’on parlait debout.

On en est là, assis entre la rage et le désespoir, face à l’absurde, face au vide, mais pourtant on continue. On se heurte à nos institutions, notre entreprise, notre famille, nos amis. A leur dire ce qu’on voit, ce qu’on vit, ce que les copains vivent. Mais rien ou si peu.

Il y a deux semaines j’étais sur le piquet des raffineurs du Havre. Là bas on voit les institutions et la société à nu. Tout s’y retrouve à poil. En arrivant, des flics, en armes, devant un panneau « propriété privée ». Derrière, la méga-usine Total qui crame le climat pour le profit des actionnaires. A côté, un panneau disant qu’ils économisent du CO2, le mensonge et l’absurde. Devant : des travailleurs, menacés de réquisition (certains ont eu droit aux flics chez eux à 3h du matin devant les enfants), mais debout. Des camarades de paris, d’ailleurs. Debouts. Le rapport salarial mis à nu : travail ou matraque. Le climat mis à nu : crame l’atmosphère ou matraque. Mais aussi l’amitié et la fraternité : des profs, des étudiants, des gay, tout le monde, en amitié avec les raffineurs.

Parce qu’en fait, les plus jolis mots de cette lutte qui ne fait que commencer appartiennent aux parents de Serge :

Notre monde c’est aussi la lutte et la lutte c’est la fête

Quand on lit ces mots, ces mots de gens dont le fils est entre la vie et la mort, de gens qui ont malgré tout la force de se tenir debout, d’insuffler de la joie au milieu d’un tel malheur, que pèse la décision d’un conseil quelconque ? Aurais-je la force d’en écrire de tels si un de mes enfants était dans cet état pour ses idées ? Allez-savoir. Mais pourrais-je être ailleurs qu’avec eux ? J’ai versé un torrent de larmes à leurs mots : certainement pas.

Le conseil, les institutions, l’assemblée, les flics, c’est la mort. La mort figée d’une pourriture bourgeoise dont la moustache trempe dans la soupe.

La vie appartient à ceux qui luttent.

Aujourd’hui, la plupart de mes amis sont des amis de lutte, parce que quand on lutte, on vit. La lutte est une fête disent les parents de Serge. Qu’ils ont raison ! Même sous les lacrymo, les grenades et les charges, on fait la fête. Derrière les cordons de CRS ils meurent de nous faire mourir. Leur vie n’est rien que de la merde quand la nôtre est belle.

A la fin, ce sont toujours les belles choses qui gagnent.

Ce sont les bisous, la poésie, les caresses dans les cheveux, les mots doux au chevet d’un enfant, une berceuse… Ni la matraque ni le PIB.

Nous gagnerons ! Pour nous, pour nos enfants, pour la vie, pour la beauté du monde.